Il est dix-huit heures trente ; bientôt le club va fermer ses portes.
Soudain votre grand-père émerge de sa partie de Tarot ; il n’a toujours pas fait de grand chelem ; est-ce pour cela qu’une idée vient de lui traverser l’esprit si peu encombré par son jeu perdu d’avance ? Il nous rejoint et lance : « Une douzaine d’huitres à la Rochelle, ça vous dit ? »
Mon Minou, votre papa que j’appelais ainsi à l’époque (et même un peu plus tard) n’était pas très loin et son oreille aiguisée a entendu la proposition ‘trop bath’ de son papa ; il déboule, saute, sans gêne mais non sans risques pour les bouteilles, sur la table basse et s’écrie : « Et une grosse glace avec plein de chantilly, hein, promis papa ? »
La réponse collégiale ne se fait pas attendre : « C’est bath, on y va ! »
‘Chaussette’ fonce au bar avant qu’il ferme pour téléphoner à ses parents (eh ! les téléphones portables n’existent pas encore). C’est qu’elle est sérieuse pour deux, ‘Chaussette’ puisque Corine est une adorable insouciante et, comme elles vivent encore chez papa-maman, elle a à cœur de les prévenir pour qu’ils ne s’inquiètent pas.
Cette douzaine d’huitres à La Rochelle n’étant pas une première, nous sommes déjà bien organisés : nous emmenons les voitures sur le parking du HLM ; Pat invite les jumelles dans la sienne tandis que Chris me suggère de monter à l’arrière de la nôtre (« pour surveiller ton Minou ») et se glisse sur le siège passager avant.
En avant toutes !
Dans une petite heure nous serrons attablés ‘chez André’ avec nos douzaines d’huitres, de belles tranches de pain copieusement recouverte de beurre salé et un petit verre de blanc sec. Bien sûr, il y aura une grosse glace à la chantilly agrémentée de cigarettes russes pour votre papa.
Il ne sera pas loin de vingt-trois heures lorsque nous prendrons le chemin du retour après une balade digestive sur les remparts : vue splendide sur le port en sommeillé et grand bol d’air marin !