Un texte très touchant que ma soeur Hélène vient de m'envoyer ...
Juste avant de prendre 'la route' pour venir passer Noël en Agenais;
Une première depuis si longtemps et dont nous nous réjouissons tous!
Tout au bout d’un mois de décembre gris, qui n’avait même pas été capable de prendre ses habits d’hiver, se profilait un Noël… tout gris. Pour la première fois depuis très longtemps, elle serait loin de sa maison. Il n’y aurait pas de boules multicolores, pas de guirlandes scintillant à la lueur des bougies, pas de senteurs d’agrumes, pas de fumets de cuisine raffinée à partager. Demain, elle partirait ; Elle se sentait seule, si petite, vide, inutile.
Elle avait tellement besoin de réconfort ! Elle défit machinalement le ruban d’un pochon de confiseries de fêtes, auquel elle n’avait su résister le matin même à la boulangerie. Un parfum d’amande et de caramel se développait sur ses papilles, réveillait tous ses sens, envahissait son cerveau, une troublante alchimie se produisait ; il fallait qu’elle fasse quelque chose.
Fébrilement, elle fouillait dans le carton descendu du haut de l’armoire. Et voilà, il était là ! Un petit ange de velours bleu aux ailes de carton blanchi, tout petit, tout démodé, l’incontournable, celui qui avait place dans son sapin depuis plus de quarante ans. Elle l’installa en haut d’une plante verte, déguisée en arbre de Noël par la magie d’une guirlande argentée et de quelques pampilles de verre coloré. Sous le regard de l’angelot, elle se sentait déjà mieux. Elle installa, devant la plante ainsi « sapinisée », une assiette de faïence ancienne garnie d’un mélange de fruits secs, d’amandes et de chocolats, puis adressa à son ange une brève prière « veille sur l’assiette du pauvre, la part du mendiant de Noël ».
Quand il fut temps, elle tira la porte sur cet humble décor, puis passa déposer un double des clefs chez une jeune voisine, lui demandant de surveiller la maison et de venir chaque jour nourrir le chat.
Elle était ainsi prête pour ce séjour loin de chez elle, loin des traditions des années précédentes.
Quand elle revint, l’hiver était enfin installé, blanc, lumineux et pur. Le cœur chargé de souvenirs chaleureux, des sourires échangés là-bas, elle savourait le plaisir délicat de retrouver son « chez-soi », de ré-amadouer un matou fâché d’avoir été abandonnée à la garde d’une inconnue. Elle se félicitait du petit air de fête qu’elle avait improvisé avant son départ ; le retour était ainsi plus agréable. Elle était toute prête à adresser un signe de reconnaissance à son ange porte-bonheur, lorsque son regard tomba sur l’assiette de faïence… quasiment vide. Quelqu’un avait presque tout volé, et ce ne pouvait être le chat !
Mais non, l’assiette n’était pas vide. A côté de l’ultime papillote qui avait échappé au pillage, des carrés de papier pliés cachaient des fleurs, des cœurs, des sourires… et puis, quelques mots tracés au crayon, d’une écriture enfantine : merci pour les bonnes choses, j’ai bien aimé, et apprivoiser ton chat aussi, quand je suis venue avec maman. Il m’a dit que tu es très gentille. Si tu veux, quand tu seras chez toi, je pourrai revenir. Tu pourras m’apprivoiser, je serai ton amie… je te laisse des sourires et des bisous. Je m’appelle Mazie.
Alors la dame eut un petit rire, le plus joli rire qu’elle avait jamais eu. « Merci, petit ange bleu, tu as si bien veillé sur ma demeure. Mon cœur était vide, Je ne savais pas que c’était moi, le mendiant de Noël ; j’étais pauvre, et j’ai beaucoup reçu ! »